"Immram" : l'odyssée poétique de Gwennyn

La compositrice, autrice, interprète en français et breton démontre une nouvelle fois qu’elle occupe une place à part dans le paysage musical breton et même international avec ce nouvel opus 2021. Car si sa pop électro celtique est inclassable, Gwennyn fait référence chez les artistes féminines qui composent textes et musiques, tout en donnant à la langue bretonne le souffle de modernité dont elle a besoin pour rester vivante et vibrante.
Au fil de ses albums, elle est devenue une ambassadrice incontournable de la culture bretonne et de la Bretagne plus généralement. Ses concerts sont aussi pour elle l'occasion de porter les créations du célèbre brodeur breton Pascal Jaouen dont elle l'égérie, tout comme celles de la marque de vêtements Breizh Mod fabriqués en France et plus particulièrement en Bretagne.
Elle a tourné dans les plus grands festivals en Bretagne, depuis ses premiers duos aux côtés d'Alan Stivell, mais aussi en Allemagne, en Autriche, en Espagne, en Belgique, au Vietnam, à Singapour ou au Brésil. De sa voix aérienne et sensuelle, elle séduit le public au delà des frontières de la langue. Ce qui prime est sa fougue, son authenticité et son énergie "startijenn".
Toujours entourée de musiciens de talent, dont Patrice Marzin à la guitare (qui signe également les arrangements de ses albums), on retrouve dans Immram, Manu Le Roy à la basse, Yvon Molard aux percussions, Kévin Camus au uilleann pipe, David Pasquet, à la bombarde, mais également Philippe Turbin au piano, Ronan Rouxel aux cordes et Jean-Louis Cortès aux claviers.
Pour ce septième opus, Gwennyn a composé également de belles rencontres musicales avec par exemple, Soïg Siberil le guitariste virtuose breton sur le titre Mizioù Du, ou le célèbre Bagad de Lann-Bihoué pour War an Hent et Kimiad, un chant traditionnel popularisé par Alan Stivell. 

Onze titres dont la plupart écrit par Gwennyn, tous traduits en français dans le livret, pour les non-bretonnants dont la poésie de l'artiste pourrait échapper.
Immram, qui signifie odyssée en breton et en gaélique, dévoile à chaque titre une facette, un indice, comme une petite pierre semée le long du chemin, mais, qui une fois les unes assemblées aux autres, tracent un parcours dont on prend vraiment la mesure et le sens.

La voix de Gwennyn et ses ballades nous entrainent au-delà des monts, des falaises, des abers ou des mers, au cœur d'un voyage intérieur, intimiste, très habité, largement inspiré par le huis-clos forcé du confinement national qui, finalement est devenu presque une bénédiction pour l'écriture de Immram.
Inspirée par l'odyssée celtique de Saint Brendan, moine navigateur irlandais qui fonda l'abbaye de Landevennec, Gwennyn reprend le principe de cette tradition littéraire qui permettait aux récits de traverser le temps. Chaque chanson, comme une île sur laquelle on accoste, nous raconte son histoire et les vents qui la traversent.

Gwennyn nous narre le monde, mêlant les vibrations d'antan et les sonorités les plus contemporaines, dans des compositions originales qui abordent les questions du féminin, du féminisme, de la langue et la culture bretonnes, de l'environnement, de l'amour qui part et qui revient, de l'identité profonde de chacun, de la ronde folle du temps...

Immram est une belle bulle poétique et sensible, une bouffée de lumière, au féminin, comme puisée dans la matrice du monde, du côté de l'île aux femmes, où l'été va enfin pouvoir s'épanouir, grâce à ces textes inspirés, cette voix sensible et ces habiles arrangements de Patrice Marzin. Un très bel album à ne pas manquer !